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27 novembre 2014 4 27 /11 /novembre /2014 18:48

~~Origines et géographie

La mer Caspienne est une mer fermée, ou lac endoréïque issue de la fermeture d'une mer océanique ancienne, ce qui explique sa forte salinité même si elle n'est que de 12 psu à comparer aux 38 psu de la Mer Méditerranée ou des 35 psu de l'Océan Atlantique, et aussi la présence dans ses sous-sols de fortes quantités de pétrole et de gaz nées de la décomposition des planctons. C'est une mer au contour rectangulaire relativement régulier, long dans sa plus grande longueur de 1030 km et large dans sa plus grande largeur de 435 km, pour une superficie totale de 371000 km². Son niveau est à situer à environ 28 m en-dessous des océans et autres mers. Sa profondeur moyenne est de 184 m mais elle va augmentant de l'Est à l'Ouest avec un maximum de 1084 m. Cette mer est alimentée principalement par la Volga (80% des débits entrants) et l'Oural, la participation des autres fleuves Koura et Emba étant marginales. Elle fait finalement partie du même site hydrologique que les mers Méditerranée, Noire, d'Azov et d'Aral, héritées de la disparition de la mer Parathétys au cours du Pliocène.

-- Administration

La mer Caspienne est entourée de cinq nations, dont quatre nées de l'éclatement de l'URSS dans les années 1990. Et cela est un facteur handicapant, alors qu'avant la chute du Mur de Berlin, seules deux nations se partageaient ses rives - l'URSS et l'Iran – nous avons aujourd'hui en lieu et place de l'URSS, l'Azerbaïdjan, le Turkménistan, la Russie et le Kazakhstan, quatre nations qui se sont différenciées pour diverses raisons. Cette situation provoque quelques problèmes quant à la définition de l'étendue et des frontières des eaux territoriales, chacune de ces nations arguant selon ses intérêts géostratégiques la thèse du concept de lac ou de mer. La solution Lac, c'est l'exemple du Lac Léman (constitué seulement d'eau douce) et que se partagent équitablement la France et la Suisse. L'exemple de la Mer, elle est salée l'eau, impose la création d'une zone internationale avec la création de zones d'eaux territoriales. Cela a son importance si considère la longueur des littoraux. Les deux moins lotis sont la Russie et,l'Iran avec respectivement 695 et 724 km de côtes, les républiques d'Azerbaïdjan, du Turkmenistan et du Kazakhstan se partageant le reste avec respectivement 955 km, 1200 km et 2320 km. C'est ainsi que l'Iran préfère parler « d'étendue d'eau » unique dans son genre et qui présente une importance capitale pour ses états riverains, qui doivent partager son utilisation, la mise en valeur de ses ressources naturelles et la préservation de son environnement, selon un mémo déposé aux Nations Unies (lettre Ref. A/52/324 de l'Iran aux Nations Unies du 8 septembre 1998). D'un point du vue de Défense Armée, la Russie dispose de puissances marines considérables basées à Astrakhan ainsi que les diverses nations de l'ex-URSS qui ont hérité de divers bâtiments lors de la désintégration de l'URSS. Un point important, il s'agit de navires de surface, sans sous-marin avec aussi l'appui d'une force aérienne mais qui n'est pas une force de supériorité aérienne (absence de Su27 et de Mig29). L'Iran pour sa part ne possède pas de navires de surface d'importance mais est protégée par des forces aériennes relativement conséquentes si ce n'est l'état de leur obsolescence, vis à vis des forces armées apportées par les Etats-Unis d'Amérique dans la région, notamment en Azerbaïdjan, dans le but de réduire l'influence russe dans la région. L'Iran étudie par ailleurs la possibilité d'introduire des sous-marins en Mer Caspienne de façon à combler son désavantage stratégique. Notons que les USA veulent faire de l'Azerbaïdjan une puissance de l'OTAN ce qui pose des problèmes d'irritation de la part de la Russie et du Kazakhstan, sans parler de l'Iran. Cette question suscite aussi des interrogations en Turquie, en Arménie et dans les pays arabes du Golfe Arabique.

-- Ressources naturelles

C'est une grande interrogation, comment partager les ressources naturelles ô combien nombreuses en cette région particulière.La Russie propose de découper le fond de la Mer Caspienne selon des méthodes géométriques. Il s'agirait de découper sous l'eau des frontières au sens du droit international (ie selon les règles du droit maritime) en laissant libre l'espace marin. Cela pose un énorme problème quant à l'exploitation du pétrole et du gaz en cette région. Les nappes ne sont pas nécessairement au droit de ces frontières artificielles. Les ressources naturelles exploitables sont principalement situées dans le sud de la Mer Caspienne, entre l'AzerbaIdjan, l'Iran et le Turkménistan. Il convient ainsi de procéder à un partage juste et équitable entre les nations riveraines. Mais il existe aussi une autre ressource naturelle considérable de la Mer Caspienne qui est son biotope si particulier, avec en particulier une grande richesse piscicole tant en qualité qu'en quantité.

-- Distribution des ressources naturelles

Une deuxième question apparaît alors : la distribution de ce pétrole et de ce gaz au monde. Plusieurs solutions sont à l'oeuvre, chacune présentant des avantages et des inconvénients. La Russie souhaite que tout passe par elle. Les USA, c'est à dire les majors pétrolières occidentales, souhaitent que tout passe par la Turquie. Le pétrole de la Mer Caspienne s'écoule principalement selon deux axes.L Le premier, datant de l'Union Soviétique part de Bakou, traverse l'Azerbaïdjan et la Russie pour déboucher sur la Mer Noire à Novorossisk. Le deuxième part de Bakou, traverse l'Azerbaïdjan et la Géorgie pour déboucher sur le port de Soupsa sur le sud de la Mer Noire. Deux autres oléoducs sont en passe d'être réalisés Le premier, fortement influencé par les USA doit partir du Turkmenistan, passer sous la Caspienne, passer par Bakou, traverser la Géorgie puis la Turquie pour aboutir à Ceyhan sur la Mer Méditerranée. Un autre projet est purement iranien : il consisterait à rejoindre la Caspienne à Bandar E Abbas pour une connexion avec l'oléoduc Iran-Pakistan-Inde, devant rejoindre le port d'Asaluyeh sur la côte iranienne du Golfe Persique à New Delhi via le Pakistan.

-- Considérations géostratégiques

On voit ainsi qu'il est impossible de considérer les conditions de l'exploitation des ressources naturelles pétrolières et gazières à partir de la simple considération des cinq puissances riveraines de la Mer Caspienne. Il faut aussi considérer l'ensemble des parties en présence qui doivent travailler dans un climat appaisé. Il nous faut donc aborder les questions entourant les relations entre ces cinq puissances détentrices de la richesse (Iran, Azerbaïdjan, Russie, Kazakhstan et Turkmenistan), mais aussi la Turquie, la Géorgie, l'Arménie, le Pakistan et l'Inde, et dans une moindre mesure les principaux clients d'aujourd'hui, les USA et l'Europe.

Commençons par les deux derniers.

Les USA sont en train, à tort ou à raison, de redéployer leurs activités pétrolières autour de l'exploitation des schistes bitumineux et sont d'ores et déjà arrivés à un tel point, que leurs activités dans les hydrocarbures sont redevenues excédentaires.

L'Europe est partie dans un vaste programme d'investissement dans les énergies renouvelables, là encore à tort ou à raison, mais à un point tel que l'on constate d'ores et déjà un ralentissement notable de la consommation des hydrocarbures, peut-être aussi du à une stagnation de sa croissance économique.

Concernant le Pakistan et l'Inde, ces deux puissances ont de tels antagonismes, que l'on se demande comment ils pourraient s'entendre sur la construction d'un oléoduc commun pour un développement économique commun.

A ma connaissance, il n'y a pas d'opposition entre l'Iran et le Pakistan, si ce n'est peut être un antagonisme religieux entre chiites et sunnites.

Avant d'aborder les relations entre les diverses puissances riveraines, force est de constater que les relations entre la Russie, la Turquie, la Géorgie, l'Arménie sont très compliquées. La Russie a de facto annexé une grande partie de la Géorgie, sans armistice et sans paix signée. L'Arménie a de facto annexé le Haut Karabakh, coupant l'Azerbaïdjan en deux, sans armistice ni traité de paix. Un vieux contentieux oppose l'Arménie à la Turquie depuis le génocide de 1915. La Géorgie et l'Arménie sont les hôtes de diverses églises dites des chrétiens d'Orient au milieu de nations par essence musulmanes, qu'elles soient chiites ou sunnites. Dans d'autres régions du Moyen Orient, ces religions sont persécutées et donc la Géorgie et l'Arménie développent un sentiment de méfiance, sinon de défiance. Maintenant, considérons les relations entre la Turquie et l'Iran. Deux puissances, l'une sunnite, l'autre chiite qui se disputent une certaine hégémonie dans l'Asie du Sud-Ouest : La Turquie est ce qui reste de l'Empire Ottoman, dissous avec les accords Sykes-Picot , suite aux opérations britanniques menées par le Colonel Lawrence dans la péninsule arabique. Depuis, la Turquie est devenue laïque, même si son actuel président Recep Tayyip Erdogan veut réislamiser la constitution turque.

L'Iran est en quelque sorte le Vatican du chiisme et est une nation républicaine, du moins au sens où on peut l'entendre en Occident. Il existe cependant une alliance géostratégique implicite entre la Turquie et l'Iran, pilotée par Israël, pour assurer une certaine stabilisation de la région, malgré tous les anathèmes lancés par les uns et les autres vis à vis de ces mêmes uns et autres. Il s'agit ici d'un accord implicite au bénéfice de chacun, avec tous les inconvénients que cela peut comporter. Les banques turques et israéliennes sont ainsi les plus grands contributeurs aux finances de l'Iran depuis le début de l'embargo lancé par les USA contre l'Iran.

Concernant, l'Azerbaïdjan et la Russie, on ne peut là non plus éviter la Turquie. Les azéris sont de culture turque en effet. Or la Russie orthodoxe est très remontée contre les vieilles exactions des hordes ottomanes contre les communautés du Sud de la Russie. De plus, la Turquie est membre de l'OTAN et est candidate pour une adhésion à l'UE. Rappelons que les Britanniques et les USA font le pressing pour que l'Azerbaïdjan adhère lui aussi à l'OTAN. Or pour Vladimir Poutine, du fait de la dissolution du Pacte de Varsovie, l'OTAN n'a aucune légitimité et sur ce point, nous ne pouvons lui donner tort.

C'est ainsi que l'on voit qu'il est très difficile d'arriver à une union stratégique tripartite entre les trois nations majeures de la région, la Russie, l'Iran et la Turquie seule susceptible d'assurer la paix et la prospérité durables dans le bassin de la Mer Caspienne. En attendant, les états riverains se réunissent une fois l'an pour parler et faire avancer la cause de la Mer Caspienne. Entre le 27 et le 29 septembre 2014 a eu lieu le quatrième sommet des cinq nations caspiennes.

--Sommet des états de la Caspienne, 27-29 septembre 2014

Ce sommet, qui s'est tenu en territoire russe à Astrakhan a réuni dans sa session finale les cinq présidents des nations riveraines : M. Vladimir Poutine, Président de la Russie M. Ilhkham Aliïev, Président de l'Azerbaïdjan M. Hassan Rohani, Président de la République Islamique d'Iran M. Gourbangouly Berdymuhammedov, Président du Turkménistan M. Noursoultan Nazarbaïev, Président du Kazakhstan

Ce sommet a eu pour objet de définir les grands principes de coopération sur lesquels reposera la Convention sur le statut de la mer Caspienne. Quant au texte de la Convention, il pourra être adopté déjà au prochain sommet des pays riverains, estiment les présidents. La Russie, le Kazakhstan, l’Azerbaïdjan, l’Iran et le Turkménistan cherchent depuis déjà plus de 20 ans à établir le statut de cette mer fermée. La tâche n’est pas des plus faciles.

Or les principales difficultés semblent enfin surmontées. Les ententes réalisées à Astrakhan répondent aux intérêts durables de toutes les parties, est persuadé le président russe.

« L’essentiel est que nous avons concerté la déclaration politique, qui fixe pour la première fois les principes majeurs de la coopération à Cinq sur la Caspienne. Les ententes conclues répondent aux intérêts à long terme de toutes les parties. Nous sommes reconnaissants aux partenaires pour leur volonté et leur savoir-faire en vue de trouver des compromis indispensables et acceptables. »

La Russie s’en tient à la position suivante : la Caspienne est un lac unique et doit bénéficier d’un statut juridique particulier. Les normes de la Convention de l’ONU sur le droit maritime international touchant en particulier la mer territoriale, la zone économique exclusive et le plateau continental ne lui sont donc pas applicables.

Le grand principe au regard de la Russie peut être formulé comme suit : « délimiter le fond à des fins d’exploitation des ressources du sous-sol, exploiter les eaux en commun ». Il est proposé d’établir des zones de juridiction nationale larges de 25 miles, les eaux au-delà de ces zones sont utilisées par tous. La position de la Russie est partagée par l’Azerbaïdjan et le Kazakhstan. L’Iran (cf. plus haut) préconisait un autre point de vue : Téhéran considérait que la mer devait être divisée en cinq parties égales. Les points de vue de Moscou et de Téhéran se sont rapprochés après la récente visite à Moscou du chef de la diplomatie iranienne M. Mohammad Jawad Zarif. La signature apposée par le président iranien au pied de la déclaration adoptée au sommet le confirme. La signature des documents au sommet sur la Caspienne montre la volonté politique des Etats à développer leur interaction, a déclaré le Président iranien.

La position constructive de Bakou a considérablement contribué aux compromis trouvés ces temps-ci. L’Azerbaïdjan a déjà réglé dans un format bilatéral la plupart des questions litigieuses. Ces ententes ont posé encore une pierre dans la fondation de la future Convention sur le statut de la Caspienne, estime le Président azerbaïdjanais. A en juger d’après les interventions des dirigeants, ils sont persuadés que la conclusion de la Convention caspienne sera conclue dans un avenir immédiat.

A la réunion élargie des propositions concrètes en vue de promouvoir la coopération ont été faites. Par exemple, le président du Kazakhstan a suggéré de créer une zone de libre échange. On peut cependant objecter que cet accord quintupartite, du fait même qu'il s'écarte des notions définies de lac et de mer, devra recevoir l'aval de l'Assemblée Générale des Nations Unies, ce qui est loin d'être gagné. Tandis que le Président turkmène a attiré l’attention sur un essor de l’infrastructure des transports. Il a avancé l’idée de créer un cercle de chemin ferroviaire autour de la Caspienne. L’idée a plu au président russe. La Russie trouve prometteur le projet de construction d'une voie ferrée autour de la Caspienne, a déclaré le président russe. " L'enjeu est de relier les principaux ports maritimes de la Caspienne pour réduire le temps et les coûts de transport des marchandises et, par conséquent, rendre nos économies plus compétitives ",

Notons au passage que ce projet est un des projets développés par l'économiste américain Lyndon H. LaRouche au début des années 1990. Il s'agissait en fait de créer à partir du bassin de la Mer Caspienne des corridors de développement vers les régions asiatiques de Russie et du Sud-Ouest asiatique utilisant l'énergie nucléaire. L'utilisation de la filière de quatrième génération MHTGR devait être utilisée pour permettre la production d'eau douce pour le développement d'une agriculture vivrière dans les steppes, cela allant avec le détournement d'une partie des eaux des grands fleuves sibériens (Ob et Ienissei) pour revitaliser le bassin de la Mer d'Aral, qui nous l'avons vu fait partie du même bassin que la Mer Caspienne.

Le président russe a souscrit au point de vue de ses quatre homologues, selon lequel les décisions de leur IVe sommet constituaient une percée importante. Les principes d’interaction et de solution des questions essentielles sur la Caspienne ont été concertés. Les parties ont paraphé un accord de coopération dans l'hydrométéorologie et ont assisté à la signature de l'accord de coopération dans la prévention et l'élimination des situations d'urgence en mer Caspienne et de l'accord sur la préservation et l'exploitation rationnelle des ressources biologiques marines.

Les cinq leaders se sont mis d’accord que la navigation sera livre sur la Caspienne pour les pays riverains. Mais ils n’admettront pas de présence militaire étrangère dans les eaux de la Caspienne, qui doit rester une mer d’amitié, une zone de paix, de coopération et de bon voisinage.

-- Autres considérations

Il existe aujourd'hui un grand danger pour l'équilibre du Sud-Ouest Asiatique qui menace l'équilibre du Kurdistan à cheval sur la Syrie, la Turquie, l'Azerbaïdjan et l'Iran et par extension le bassin de la Mer Caspienne. Je veux parler du Daech, ou Etat Islamique. Cette insurrection, qui ressemble en bien des points aux opérations menées par Lawrence dans la péninsule arabique il y a un siècle, vise à la création d'un califat sur les territoires qu'ils contrôlent. On peut penser que cela n'est en fait que la façade d'un projet plus ambitieux : contrôler l'ensemble des réserves en hydrocarbures de la région. Outre le barbarisme sans limite dont fait preuve ce qu'il faut bien appeler une armée, nous devons faire attention à la monopolisation de toutes les ressources de la région, allant jusqu'à la disparition des états souverains. Cette insurrection s'attaque en effet en priorité à tous les gisements de la région. Or, les états de la région vont en ordre dispersé. L'Iran arme les chiites d'Irak, sans véritable efficacité La Turquie ne fait rien, de peur qu'une intervention ne renforce les kurdes et on a des preuves en outre que le Daech a bénéficié d'une fermeture des yeux des autorités turques quand ils ont traversé le sud du pays pour rejoindre les régions nord de la Syrie aux mains des kurdes L'Arabie Saoudite et les Etats Arabes Unis avec le Koweit laissent filer le prix du baril à la baisse dans l'espoir de limiter les bénéfices tirés par le Daech de la contrebande du pétrole qu'ils extraient des puits de pétrole qu'ils contrôlent, pour un montant relativement considérable d'environ 1,5 millions USD / jour. Imaginons que le Kurdistan tombe, c'est le bassin de la Mer Caspienne qui s'offre à leur pillage et leur barbarie. Il n'y a pas d'autre issue qu'une alliance stratégique objective entre la Turquie et l'Iran et aussi l'Irak pour éradiquer ce cancer. Avec la Russie, cette alliance pourrait constituer la base d'une alliance géostratégique pérenne pour la stabilisation de toute cette région de l'Asie du Sud-Ouest.

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